Le Petit Monde de LINO

Histoire

"A peine débarqué, on était sur la place Bertin, véritable promenade plantée d'arbres longeant la mer. Aussitôt on avait la sensation de se trouver au milieu d'une cité commerciale à la vie intense, qui paraissait se ressentir du voisinage de la fièvreuse amérique".

(Notes d'un voyageur. Le Pélerin 20 mai 1902). 


 Origines de la colonisation (ou comment les français se retrouvent aux Antilles)

L'histoire de Saint-Pierre est étroitement liée à celle de la colonisation de la Martinique, et marque le début de la présence française (terrestre) aux Antilles. Petit rappel des faits :

Le XVIIème siècle est une période agitée en Europe. Anglais, espagnols, français, hollandais, portugais..., ensemble ou l'un contre l'autre, s'entre-déchirent au gré des coalitions. Bientôt, le conflit atteint les Antilles. Français et anglais, en particulier, vont tenter d'affaiblire la puissance espagnole en coupant les routes maritimes vers ses riches possessions d'Amériques.

La découverte du "Nouveau Monde" ébranle le fragile équilibre européen. L'Espagne et le Portugal s'enrichissent considérablement
Depuis les découvertes de Christophe Colomb, cela fait plus d'un siècle déjà, qu'Espagne et Portugal se partagent les terres et les richesses du nouveau monde. Des galions chargés d'or et de produits tropicaux font la navette vers les ports de Séville et de Cadix. L'or alimente les caisses du royaume. L'indigo, le bois rouge du Brésil, le sucre, le tabac, ..., s'écoulent facilement auprès de l'aristocratie et de la haute bourgeoisie européennes, et font la fortune des négociants. Cette soudaine richesse des royaumes d'Espagne et du Portugal bouscule l'équilibre géopolitique du continent. D'autant, que français, anglais et hollandais sont exclus de ce juteux trafic. Une bulle papale (le pape n'est autre que l'ancien Cardinal de Barcelone), puis le traité de Tordesillas (1494), leurs interdisent tout commerce avec le nouveau monde.

La révolte gronde dans les ports d'europe du nord. Marins et marchands n'entendent pas rester en retrait
Ce ne sont pas les états d'Europe du nord qui réagiront les premiers, mais leurs sujets. Des ports de Normandie, de Bretagne, d'Angleterre ou de Hollande, des marins, des marchands commencent à organiser des expéditions entièrement financées sur capitaux privés. Leurs objectifs : Prendre part au commerce des produits tropicaux, et à l'occasion s'emparer des galions de la flotte espagnole.

Dés 1520, flibustiers et aventuriers, français pour la plupart, engagent une lutte féroce sur l'atlantique
Les hostilités commencent en 1522. Un flibustier dieppois arraisonne un navire espagnol au large des Acores. A bord, le trésor du roi aztèque Moctezuma, que Cortés destinait à Charles Quint. Le nombre de prises augmente rapidement, et les flibustiers s'enhardissent. Bientôt, ils traversent l'atlantique, envahissent la Mer des Antilles et en plus des bateaux, attaquent directement les colonies espagnoles. En 1537, des équipages français pillent plusieurs villes sur les côtes du Panama et du Honduras. En 1544, d'autres français s'emparent de Carthagène et la restituent après paiement d'une forte rançon. en or et en argent. En 1553, le corsaire Jean le Clerc pille Saint-Domingue puis les îles des Canaries.

Vers 1550, le conflit change de nature. Le royaume de France s'implique directement et se lance dans la conquête terrestre. Une aventure contrariée par le début des guerres de religion
Face aux coups très durs portés à l'économie espagnole, le royaume de France comprend tout le parti qu'il peut tirer d'une intensification des combats en Mer des Antilles. Pour aider ses corsaires, la France cherche désormais à s'implanter aux Amériques. Le but : créer des bases fortifiées capables de servir de point d'attaque ou de repli. C'est ainsi que l'amiral de Coligny envoie une première expédition fonder un fort au Brésil, en 1555 (Cette aventure sert de trame au livre de Christophe Ruffin : Rouge Brésil), puis une autre en Floride en 1562. Mais ces tentatives échouent. Les forces espagnoles anéantissent ces deux embryons de colonie, et le royaume bientôt empêtré dans ses guerres de religion abandonne toute ambition territoriale outre-atlantique, laissant le champ libre à de nouveaux ennemis de l'Espagne. A cette époque, anglais et hollandais, en conflit avec l'Espagne commencent à s'intéresser fortement à cette partie du monde.

La France éloignée du conflit, les corsaires anglais et hollandais portent le fer sous les tropiques. En moins de 50 ans, ils mettent fin à la domination espagnole sur l'atlantique. L'épisode culmine avec la déstruction de "l'Invincible Armada"
Depuis plusieurs années, les marchands anglais et hollandais tentent de commercer avec les colonies espagnoles d'Amériques. Mais l'Espagne reste intransigeante et interdit tout contact avec eux. Les bateaux surpris à trafiquer sont confisqués, les équipages emprisonnés ou pendus. La reine d'Angleterre s'emporte: "L'usage de la mer et de l'air est commun à tous, et aucun titre quelconque à l'océan ne peut appartenir à aucun peuple...". En sous-main, elle lance ses chiens de mer aux basques de l'espagnol. John Hawkins pille les Antilles en 1565. Deux ans plus tard, le pirate Drake s'empare d'un riche convoi, le trésor des Indes. Désormais, les attaques sont incessantes, et la puissance espagnole sérieusement menacée. En réaction, Philippe II, roi d'Espagne décide... d'envahir Londres. 500 vaisseaux et 100 000 hommes partent vers la Manche. Une "invincible armada" qui pourtant se disloque sous les assauts des corsaires anglais. Les navires épargnés sont drossés à la côte par une violente tempête. L'année 1588 marque la fin de la domination espagnole sur l'atlantique.

Au début du XVIIème, une fois le monopole espagnol sur le nouveau monde brisé, les nations d'Europe du nord se lancent à la conquête des Amériques. La France de Richelieu revient dans la course
En 1606, des colons anglais s'installent en Virginie. En 1623, d'autres débarquent sur l'île de Saint-Christophe et un an plus tard, le Mayflower touche les côtes de Nouvelle-Angleterre. Pendant ce temps, les hollandais mettent pied à la Nouvelle-Amsterdam (New-York) en 1624, ainsi qu'au Surinam en 1630. La France n'est pas en reste. Champlain fonde Québec en 1608, puis le Cardinal de Richelieu accélère le mouvement. Son ambition est double : Lutter contre l'Espagne bien sûr, mais aussi, et surtout développer le commerce extérieur d'une France ruinée par les guerres de religion. Il s'en donne les moyens par la création de puissants groupements de marchands, les Compagnies, et par la constitution d'une flotte de guerre à même de les protéger. En 1626, il initie les conquêtes françaises aux Antilles en créant la Compagnie de Saint-Christophe. Roissey et Belain d'Esnambuc partent avec pour mission de prendre "les îles sises à l'entrée du Pérou". 

Avant de récupérer l'héritage de saint-Pierre détruite en 1902 par l'éruption du Mont-Pelé, Fort de France est essentiellement une ville administrative et de garnison. Au cours du XXème siècle, elle s'étend rapidement et regroupe aujourd'hui plus du tiers de la population de l'île.


Un site stratégique ...

Les premiers colons débarquent au nord de la côte caraïbe et fondent la ville de Saint-Pierre en 1635. Alors que marins et flibustiers des nations européennes s'affrontent dans la Mer des Antilles pour le contrôle des routes commerciales vers le nouveau monde, ils songent à leur défense. Ouvert à tous vents, le site de Saint-Pierre se révèle difficile à protéger et peu sûr pour les navires au mouillage. Du Parquet, futur gouverneur de l'île, part à la recherche d'un nouvel emplacement. L'intérêt stratégique de la baie de Fort de France, vaste et bien protégée, ne lui échappe pas. ici, les bateaux seront à l'abri.

En 1638 un fortin est érigé sur la rive. Un petit bourg s'agglomère lentement sous ses remparts, freiné dans son expansion par la nature marécageuse du site, inhospitalière et propice aux fièvres.

"Victoire du Rhum" et Louis XIV

Attaqué en 1674 par les troupes hollandaises de Ruyter, le fortin résiste. Cette "Victoire du Rhum" encourage le roi Louis XIV à faire édifier un vrai fort.

Assainissement et fortification

Le marquis de Bass, premier gouverneur général des Antilles décide alors, de créer une ville auprès du "Fort-Royal". Le comte de Blénac est chargé de dessiner le plan de la cité et d'achever les travaux de fortification. La ville se développe et gagne progressivement sur la mangrove.

Capitale politique et militaire

Dès 1681, Fort-Royal se voit élevé au rang de chef-lieu de la Martinique et des Antilles Françaises, au détriment de Saint-Pierre. La ville joue désormais le rôle de capitale administrative, militaire et politique.

Pourtant, le poumon économique de l'île reste Saint-Pierre, dont le port de plus en plus actif concentre l'essentiel des échanges vers l'extérieur. Fort-Royal a beau s'agrandir et s'assainir, après l'assèchement de ses marécages, la ville ne compte en 1750 que 4000 habitants, contre 15000 à Saint-Pierre.

les catastrophes naturelles ...

Et la nature n'est pas tendre avec eux. 1724 : inondation. 1762 : Epidémie de fièvre jaune. 1766 : Cyclone. 1771 : Tremblement de terre.

la guerre de Sept Ans, la révolution ...

En 1762, les anglais débarquent sur l'île et prennent position sur les hauteurs au nord de la ville. Joli point de vue et plate-forme efficace, surplombant les défenses, pour bombarder soldats et habitants. L'attaque est un succès, et la ville est occupée. Rendue à la France 9 mois plus tard par le Traité de Paris, Fort-Royal sera de nouveau investie par les anglais en 1794, à la faveur des luttes intestines entre royalistes et patriotes. L'occupation dure 8 ans.

puis au XIXème siècle, de nouveaux cataclysmes

Renommée Fort de France par décret de Napoléon en 1801, la ville continue d'être la proie de catastrophes dévastatrices. Tremblement de terre en 1839. Incendie de 1890 qui détruit entièrement la ville et ses maisons en bois. Cyclone de 1891.

1902 catastrophe de Saint-Pierre

L'entrée dans le XXème siècle est marquée par l'anéantissement de Saint-Pierre, rasé par l'éruption du Mont-Pelé. Fort de France désormais seule ville de l'île recueille l'héritage commercial de son ancienne rivale. Sa population s'accroît soudainement avec l'arrivée de 6000 réfugiés des communes du nord de l'île pour qui seront construits de nouveaux quartiers (Dillon, Terres-Sainville...)

Exode rural

Cumulant toutes les fonctions, politiques, commerciales, administratives, de l'île, la ville poursuit son développement et dépasse les 50000 habitants au début des années cinquante. Commence alors, un exode rural massif. Les campagnes se vident, et Fort de France à l'étroit doit de nouveau s'agrandir. En 15 ans à peine, la population double.


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26/12/2006
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